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La Sixième Commission se penche sur un état de droit « attaqué » et « érodé » partout dans le monde

AG/J/3569
8 OCTOBRE 2018

« Démocratie assiégée », « impunité florissante », « indépendance judiciaire attaquée », l’inquiétude a été de mise aujourd’hui à la Sixième Commission, lors de son débat sur l’état de droit aux niveaux national et international, qui a vu une trentaine de délégations afficher leurs divergences sur les moyens de le renforcer. La Présidente de l’Assemblée générale, Mme Fernanda Espinosa Garcés, a également pris la parole.

Présentant le dernier rapport* du Secrétaire général sur le Renforcement et la coordination de l’action des Nations Unies dans le domaine de l’état de droit, M. Fabrizio Hochschild-Drumond, Sous-Secrétaire général pour la coordination stratégique au sein du Bureau exécutif du Secrétaire général, a donné le ton de cette séance en pointant « de préoccupantes tendances négatives partout dans le monde ».

Parmi celles-ci, M. Hochschild-Drumond a mentionné les attaques menées contre l’indépendance du pouvoir judiciaire, une sélection « politisée » des juges et les limites apportées à l’examen par les tribunaux de la constitutionalité des décisions prises par le pouvoir exécutif. Il a également fustigé l’utilisation grandissante des moyens de surveillance électronique « sans aucune base juridique ».

De telles violations, commises bien souvent au nom de la sécurité nationale et de la lutte antiterroriste, peuvent être contreproductives si elles ne se basent sur l’état de droit, a averti M. Hochschild-Drumond. Enfin, le Sous-Secrétaire général a déploré la lenteur des efforts nationaux de lutte contre l’impunité, la volonté politique manquant bien souvent, ainsi que les tentatives visant à saper les mécanismes de justice internationaux.

Ce constat inquiétant a été partagé par un grand nombre de délégations, le délégué du Danemark fustigeant, au nom des pays nordiques, « ces dirigeants qui défient les limites fixées, tant sur la scène nationale qu’internationale, » tandis que son homologue du Liechtenstein a dénoncé les attaques en règle menées contre l’ordre international.

« L’état de droit n’est pas emporté par un seul grand tsunami, il est plutôt érodé par de petites ondulations et vagues d’injustice, de négligences et d’ignorance », a alerté la représentante du Sri Lanka. Le délégué de l’Iran a, lui, souligné l’effet négatif des mesures unilatérales, jugeant « essentiel que les États Membres continuent d’adhérer à un ensemble de règles dans la conduite de leurs relations ».

Les délégations ont affiché des divergences sur les moyens de le renforcer, comme l’avait peut-être anticipé la déléguée du Gabon dans son intervention, en considérant « qu’il n’y a pas de modèle unique de renforcement de l’état de droit, car la promotion de l’état de droit est l’expression d’une vision partagée et d’une volonté politique déterminée. »

Si les pays nordiques ont ainsi rappelé l’obligation des États de protéger leur population et droits de l’homme, le Mouvement des non-alignés a tenu à dire, par la voix du délégué iranien, que la liberté d’expression n’est pas « absolue » et qu’elle doit être exercée avec responsabilité.

Mais c’est bien la Cour pénale internationale (CPI) et les mécanismes internationaux garantissant l’application du principe de responsabilité qui ont fait l’objet des dissensions les plus nettes. Si nombre de délégations, dont celles de l’Union européenne, du Liechtenstein, du Costa Rica ou du Japon, ont réitéré leur appui à la Cour et se sont félicitées qu’elle soit, depuis juillet dernier, compétente pour les crimes d’agression, certaines n’ont pas ménagé leurs critiques.

« La Cour pénale internationale est un mécanisme de politisation de la justice au niveau des individus en vertu d’une politique de deux poids, deux mesures, ce qui sape les objectifs de l’état de droit », a déclaré le délégué du Soudan, appuyé par son homologue du Kenya. Le représentant de la Suisse a, lui, dénoncé les attaques contre l’indépendance de la Cour.

Le spectre de la politisation a également brandi par la délégation de la Syrie, s’agissant du Mécanisme international, impartial et indépendant chargé de faciliter les enquêtes sur les violations du droit international commises en Syrie. « Un mécanisme illégal », « un scandale juridique et moral », a dénoncé le délégué syrien, alors que les délégations des pays occidentaux l’ont appuyé. Le représentant des Pays-Bas a ainsi souhaité qu’il soit financé par le budget de l’ONU.

Cette politisation du droit international a été au cœur de nombreuses interventions, le délégué du Cambodge prônant « une approche plus globale qui évite la sélectivité et le deux poids deux mesures dans l’application du droit international », tandis que son homologue de la République de Corée a déclaré que « l’état de droit ne doit pas servir de moyen pour exclure une région ou un pays ».

Enfin, autre signe des divergences de points de vue au sein de la Commission, la déléguée de l’Autriche a regretté que celle-ci n’ait pas été en mesure de répondre à l’appel lancé par le Secrétaire général pour un « dialogue ouvert » avec les États pour une amélioration de l’aide de l’ONU à la promotion de l’état de droit. « Nous n’avons pas été en mesure de nous entendre cette année sur un sous-thème sur la question de l’état de droit », a regretté le délégué de la Gambie, au nom du Groupe africain.

La Commission poursuivra ses travaux demain, mardi 9 octobre, à partie de 10 heures.

*A/73/253

L’ÉTAT DE DROIT AUX NIVEAUX NATIONAL ET INTERNATIONAL

Déclarations

M. ESHAGH AL HABIB (République islamique d’Iran), s’exprimant au nom du Mouvement des pays non alignés, a affirmé que le respect de l’état de droit est nécessaire pour parvenir à la paix et à la stabilité internationales. Il a exhorté l’Organisation à accorder une attention accrue à ce sujet, avant de réitérer la position du Mouvement des pays non alignés sur la nécessité de préserver un équilibre dans le développement de l’état de droit aux niveaux national et international. Selon lui, la Charte des Nations Unies et les principes qu’elle contient doivent servir de guide normatif et de fondement de l’état de droit au niveau international. Parmi les éléments essentiels afin de favoriser des relations internationales fondées sur l’état de droit, le représentant a identifié le principe d’égalité souveraine des États ainsi que le respect de droits et d’obligations similaires pour tous les États, exempt d’interprétations sélectives. Enfin, le principe d’interdiction de la menace, du recours à la force et de la résolution pacifique des conflits doit être la pierre angulaire des relations internationales entre les États Membres basées sur le droit. « À cet égard, il est essentiel que les États Membres continuent d’adhérer à un ensemble de règles dans la conduite de leurs relations avec les autres États Membres. »

Par ailleurs, a continué M. Al Habib, le Mouvement souligne le danger posé par les actions et mesures qui sapent le droit international et encouragent les États à recourir à un règlement pacifique de leurs différends. Le représentant a, en outre, souligné l’impact négatif des mesures unilatérales sur le respect du droit international ainsi que sur les relations internationales. « Aucun État ou groupe d’État n’a le pouvoir de priver les autres États de leurs droits pour des considérations politiques. » Le délégué a encouragé l’Assemblée générale à jouer un rôle moteur dans la promotion de l’état de droit. Il a par ailleurs appelé à la pleine reconnaissance de l’État de Palestine parmi la communauté des nations. Enfin, s’il a souligné l’importance de la liberté d’expression, le délégué a rappelé que celle-ci « n’est pas absolue » et qu’elle doit être exercée « avec responsabilité » conformément aux instruments internationaux pertinents.

M. AMADOU JAITEH (Gambie), au nom du Groupe des États d’Afrique, a déploré que les États Membres n’aient pas été en mesure de s’entendre cette année sur un sous-titre sur la question de l’état de droit. Selon lui, la diffusion du droit international, par la coopération multilatérale ou bilatérale, représente le meilleur moyen de renforcer l’état de droit au niveau international, notamment par le recours à la technologie. La Commission de l’Union africaine pour le droit international joue un rôle important à cet égard, a estimé le représentant, en encourageant l’enseignement et la publication d’informations relatives au droit international, tout comme l’Organisation juridique consultative pour les pays d’Asie et d’Afrique.

M. Jaiteh a appelé le Secrétariat de l’ONU à intensifier ses efforts afin d’assurer la diffusion du droit international et de renforcer l’état de droit au niveau international, notamment pour le biais du Programme d’assistance des Nations Unies aux fins de l’enseignement, de l’étude, de la diffusion et d’une compréhension plus large du droit international.

M. SOVANN KE (Cambodge) prenant la parole au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est(ASEAN), a déclaré que, depuis la création de ce groupe de pays en 1967, il avait toujours été un fervent soutien des activités des Nations Unies en faveur de la promotion de l’état de droit, principe inscrit au cœur même de la Charte créant cette organisation régionale. Au plan national, ces pays ont embrassé ce principe et le mettent en œuvre à toutes les échelles, dans le but de maintenir et de promouvoir la paix, la sécurité, la bonne gouvernance, mais aussi le respect et la protection de tous les droits de l’homme. L’ASEAN a en outre développé une série d’instruments visant à faciliter et renforcer la coopération entre ses États membres à cette fin. Parmi ces outils, il y la Déclaration des droits de l’homme de l’ASEAN et le Plan communautaire de la sécurité politique de l’ASEAN, a-t-il cité.

M. Ke a également déclaré que l’ASEAN, qui reconnaît le rôle des Nations Unies dans la connaissance et la dissémination du droit international, est cependant d’avis que le renforcement et la promotion du droit international requièrent une approche plus globale qui évite la sélectivité et le deux poids deux mesures dans l’application du droit international. Le groupe pense aussi que la réduction des doublons et l’amélioration de l’efficacité sont autant de moyens de rationaliser l’engagement de tous les partenaires.

Estimant qu’avec les progrès des technologies, l’ONU doit adapter ses méthodes de travail en conséquence, les pays de l’ASEAN se félicitent de l’inscription au programme de travail de la Commission d’un point intitulé « renforcement et promotion du cadre institué par les traités internationaux ». Ils espèrent donc qu’il sera possible de progresser et de permettre à l’Assemblée générale de prendre des actions concrètes sur la question du règlement découlant de l’Article 102 de la Charte des Nations Unies, relatif à l’enregistrement des traités, a conclu le représentant.

M. ERIC CHABOUREAU, délégué de l’Union européenne, a salué le rapport du Secrétaire général, qui répond aux besoins des États Membres afin d’assurer le bon fonctionnement des institutions judiciaires et sécuritaires ainsi que l’application du principe de responsabilité pour les crimes graves en vertu du droit international. Il a noté avec satisfaction les mesures destinées à réduire la violence, notamment dans les cas de violation des droits de l’homme par les forces de sécurité, ainsi que le renforcement de la protection des personnes vulnérables telles que les personnes déplacées et les réfugiés. Nous devons assurer le respect des droits des femmes et leur pleine participation au sein des institutions juridiques et gouvernementales, a-t-il ajouté.

L’Union européenne appuie la reconnaissance obligatoire par les États de la compétence de la Cour internationale de Justice (CIJ) et d’autres tribunaux afin de résoudre les différends entre les États et de promouvoir un ordre international fondé sur des règles et l’état de droit, a poursuivi M. Chaboureau. Pour lui, les traités internationaux et les décisions juridiquement contraignantes permettent d’harmoniser les relations internationales et devraient être mis en œuvre de bonne foi.

Après avoir rappelé qu’il incombe en premier lieu aux États Membres de mener des enquêtes et d’intenter des poursuites en cas d’infractions graves au regard du droit international, le représentant a noté que toute négligence à cet égard a pour effet de prolonger les conflits, d’entraîner des représailles et d’entraver les efforts de réconciliation. Il a réitéré son appui à la Cour pénale internationale (CPI) et au Mécanisme international, impartial et indépendant pour les crimes graves commis en Syrie, notant toutefois qu’il n’est pas souhaitable de financer de tels mécanismes par le biais de contributions volontaires.

M. Chaboureau a reconnu le besoin de mettre en place « des stratégies de transition » exhaustives entre les opérations de maintien de la paix et l’aide au développement, y compris pour remédier au sous-financement des équipes humanitaires de pays, afin de parvenir à une paix durable. Il a encouragé les États Membres à soutenir les efforts pour mettre en œuvre l’objectif 16 de développement durable –« Promouvoir l’avènement de sociétés pacifiques et ouvertes à tous aux fins du développement durable »- en vue du Forum politique de haut niveau 2019. Estimant que les différentes composantes de l’état de droit se renforcent mutuellement, il a rappelé que sa promotion est l’affaire de tous les États.

M. IB PETERSEN (Danemark), qui s’exprimait aussi au nom du Groupe des pays nordiques, a rappelé la responsabilité première qui incombe à l’État de protéger sa population. Le manque de volonté ou l’incapacité d’un État à le faire constitue une violation de sa responsabilité de protéger, a-t-il dit, en déplorant le peu d’attention accordée aux crimes perpétrés contre des minorités ethniques ou religieuses et aux crimes haineux. Il a pris l’exemple du Myanmar, pays dans lequel l’impunité est enracinée. Il a appelé de ses vœux « une action internationale urgente » afin d’aboutir à une reddition de comptes et à une promotion de l’état de droit dans ce pays.

M. Petersen a fait remarquer les liens très étroits entre l’état de droit et les trois piliers des Nations Unies -paix et sécurité, droits de l’homme et développement-, avant de rappeler que les États ont la responsabilité principale dans la protection des droits de l’homme. Il a rappelé que les pays nordiques sont des partisans résolus de la Cour pénale internationale (CPI). Celle-ci est « un tribunal de dernier recours », a-t-il dit, ajoutant qu’elle ne cherche pas à remplacer les tribunaux nationaux, mais à les compléter. « La Cour doit continuer son travail, de manière indépendante, sans se laisser décourager, sur la base des compétences octroyées par le Statut de Rome et conformément aux principes de l’état de droit. » Il s’est aussi placé en défenseur des procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme et du mécanisme ad hoc en Syrie.

Enfin, le représentant a repris à son compte la déclaration faite par le Secrétaire général devant l’Assemblée générale le 25 septembre, selon laquelle « les principes démocratiques sont assiégés et l’état de droit sapé ». L’impunité est également florissante, avec des dirigeants qui défient les limites fixées, tant sur la scène nationale qu’internationale. À cette aune, il a jugé essentiel de continuer d’accorder une pleine attention à l’état de droit.

Mme. CATHERINE BOUCHER (Canada), s’exprimant au nom des délégations du Canada, de l’Australie, de la Nouvelle-Zélande (CANZ), a déclaré que ces trois pays sont de grands défenseurs du principe de l’état de droit et d’ardents promoteurs d’institutions démocratiques fortes et stables aux niveaux national et international, d’autant que ce principe est essentiel au développement durable, à la paix et à la sécurité internationales.

Ces délégations constatent cependant que le maintien et l’élaboration d’un état de droit se heurtent à deux défis distincts, à savoir le renforcement de l’état de droit au plan international et le renforcement de l’état de droit dans les cadres constitutionnel et juridique de chacun des États. Ces deux défis sont aussi importants qu’ils sont interdépendants. Chaque État a certes le droit souverain de créer ses propres lois et propres politiques, mais la manière dont ces lois et politiques sont élaborées et appliquées est tout aussi capitale, car elle permet de créer des plateformes qui permettent à leur tour d’interagir au plan international, a expliqué la représentante.

C’est pourquoi, en tant que partenaires engagés dans la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030, le Canada, l’Australie et la Nouvelle-Zélande sont très actifs au sein des institutions internationales et dans le renforcement des capacités et du principe de responsabilité dans les pays fragiles de leur région. Grâce à cette coopération, les capacités régionales dans la lutte contre la criminalité transnationale ont été mises en place. De nombreux experts ont par ailleurs été affectés au renforcement d’institutions judiciaires dans le cadre de la coopération bilatérale. Ces efforts ont contribué à assurer un meilleur accès à la justice, adapté aux circonstances nationales et locales. Ils ont également permis de renforcer l’indépendance et l’efficacité des processus judicaires, s’est félicité la représentante.

En tant que Coordonnatrice des 50 États du Groupe des Amis de l’état de droit, Mme NADIA ALEXANDRA KALB (Autriche) s’est dite heureuse que le Secrétaire général ait maintenu l’état de droit au cœur de la coordination des politiques à l’échelle du système. Elle a néanmoins regretté que la Commission n’ait pas été en mesure de répondre à l’appel lancé par le Secrétaire général pour un dialogue ouvert avec les États Membres pour une amélioration de l’efficacité, de la viabilité et de la cohérence de l’aide de l’ONU à la promotion de l’état de droit.

Nous devons faire plus pour appuyer les États Membres dans la mise en œuvre de l’état de droit, en lien avec le Programme de développement durable à l’horizon 2030, dans la mesure où l’état de droit joue un rôle décisif dans l’élimination de la pauvreté, l’édification d’institutions inclusives et solides et la protection de l’environnement, a poursuivi la représentante. L’établissement des responsabilités et la lutte contre l’impunité en cas de violations des droits de l’homme et du droit international humanitaire sont essentiels pour la reconstruction des sociétés après les conflits et l’instauration d’une paix durable, a poursuivi Mme Kalb, qui a exprimé son ferme appui à la Cour pénale internationale (CPI) et s’est félicitée que celle-ci ait désormais compétente pour le crime d’agression. Elle a appuyé les mécanismes internationaux d’établissement des responsabilités, comme en Syrie et au Myanmar.

La déléguée a appelé tous les États à promouvoir un ordre international fondé sur l’état de droit et le droit international, avec l’ONU en son centre. Cela implique, a-t-elle insisté, la ratification des accords internationaux dont les traités relatifs aux droits de l’homme et le règlement des différends par des moyens pacifiques. Enfin, elle a souligné l’importance de la Commission du droit international dans la codification et le développement progressif du droit international. « Nos efforts de promotion de l’état de droit ne visent pas un objectif abstrait mais bien la protection des droits et intérêts d’individus. »

La conjoncture mondiale montre que les pays qui sont faibles en matière d’état de droit sont plus vulnérables aux conflits, a constaté M. ALI AHMAD ALMANSOURI (Qatar). La communauté internationale a convenu que l’état de droit ne prévaudra jamais sans la primauté de l’être humain et des droits de l’homme; l’état de droit est un élément essentiel de tous les droits individuels. Pour lui, les relations entre les États doivent se fonder sur le respect du droit international et des droits et obligations mutuelles. Le droit international met l’accent sur le respect de la souveraineté et de la sécurité des États, a-t-il rappelé.

Les institutions gouvernementales du Qatar respectent pleinement l’état de droit, a poursuivi le représentant, précisant que la Constitution qatari précise les droits et obligations de chaque branche du Gouvernement. Le Qatar a participé au règlement politique des différends et des conflits régionaux et internationaux dans le respect de la Charte des Nations Unies et du droit international, a assuré le représentant.

Mme SHARA DUNCAN VILLALOBOS (Costa Rica) a constaté l’existence d’obstacles à la mise en œuvre de l’état de droit et à l’indépendance du système judiciaire, comme la politisation de la nomination des juges, appelant les États à tirer parti de l’assistance fournie par l’ONU en la matière. Malgré les progrès réalisés dans le domaine social, la représentante a relevé les défis qui subsistent, notamment les migrations massives et le terrorisme, appelant à la mise en place d’un cadre institutionnel robuste. Selon elle, la promotion et le respect de l’état de droit, l’accès à la justice pour tous de même que le respect des institutions démocratiques sont essentiels pour parvenir à la paix et la stabilité.

En particulier, la représentante a appelé à s’attaquer aux causes profondes de la violence envers les femmes et à assurer leur accès à la justice. Pour sa part, a-t-elle poursuivi, le Costa Rica est convaincu de l’importance de la résolution pacifique des différends, notamment par le recours à la compétence de la Cour internationale de Justice (CIJ) et la Cour pénale internationale (CPI).

L’activation de la compétence de la Cour pénale internationale (CPI) dans les cas de crimes d’agression est d’une importance capitale, a rappelé M. SINA ALAVI (Liechtenstein). « Il s’agit d’un jalon dans le développement de l’état de droit », a-t-il poursuivi, en se félicitant de la « pénalisation de la forme la plus grave d’utilisation illicite de la force ». Il a rappelé que son pays est l’un des 36 à avoir ratifié les amendements de Kampala sur le crime d’agression et plaidé pour un soutien à la Cour pénale internationale, alors que « l’ordre international est en butte à de telles attaques. » « Vingt ans après l’adoption du Statut de Rome, il est de notre responsabilité de défendre cette vision et de renforcer la Cour. »

M. Alavi a souligné la nécessité de trouver des moyens alternatifs de reddition de comptes « alors que le Statut de Rome n’est pas universel et que le Conseil de sécurité ne joue pas le rôle que lui a dévolu ce Statut. » À cette aune, le délégué s’est félicité de la création par l’Assemblée générale du Mécanisme international, impartial et indépendant chargé de faciliter les enquêtes sur les violations les plus graves du droit international commises en République arabe syrienne. Il a en outre salué l’établissement d’un mécanisme similaire pour le Myanmar par le Conseil des droits de l’homme. « Cela envoie un signal fort que justice doit être rendue. » Enfin, le délégué a déclaré que l’état de droit est un accélérateur en vue de la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030.

Mme ANNETTE ANDRÉE ONANGA (Gabon) a rappelé qu’il n’y a « pas de modèle unique de renforcement de l’état de droit », car la promotion de l’état de droit est l’expression d’une vision partagée et d’une volonté politique déterminée. « Le renforcement de l’état de droit est un pilier de la vision d’un Gabon émergent à l’horizon 2020. » Elle a mentionné les profondes réformes menées pour revitaliser l’appareil judiciaire et assurer son indépendance, ainsi que la mise en place d’un cadre législatif pour pénaliser l’intolérance, le tribalisme et le racisme.

Depuis mars 2017, une opération anticorruption a été lancée contre les personnalités soupçonnées de malversations financières, a indiqué Mme Onanga. Enfin, elle a réaffirmé la centralité de la souveraineté, « soumise à des pressions sans précédent », ainsi que l’obligation des États et des institutions internationales de la respecter. « C’est un gage de relations plus harmonieuses entre les États. »

M. HARUKA SAWADA (Japon) a assuré que la promotion de l’état de droit, en tant que pilier essentiel de la justice dans les sociétés, était partie intégrante de la politique extérieure de son pays. Le Japon attache donc une grande importance aux mécanismes internationaux de résolution pacifique des conflits, notamment la Cour internationale de Justice (CIJ), le Tribunal international du droit de la mer (TIDM) ou encore la Cour pénale internationale (CPI). Le Japon apprécie également le travail fait par le Secrétaire général dans la promotion de l’universalisation du droit international.

Se félicitant par ailleurs des discussions tenues cette année au sein de la Commission du droit international, M. Sawada s’est réjoui d’avance de débattre avec elle, dans le contexte de ses 70 ans d’existence. Il a en outre expliqué que son pays est très actif dans la promotion du droit international à l’extérieur. Le Japon travaille en étroite collaboration avec ses voisins asiatiques et les pays africains au sein de l’Organisation juridique consultative pour les pays d’Asie et d’Afrique (AALCO), dont la session annuelle se tient cette semaine à Tokyo. Le Japon fournit en outre des services de renforcement de capacités en matière juridique par le biais de l’Agence japonaise de Coopération internationale.

Les progrès réalisés par les Nations Unies dans le domaine de l’état de droit répondent aux priorités de son pays, a déclaré Mme DARJA BAVDAŽ KURET (Slovénie), avant de donner pour exemple les mesures prises pour assurer l’égalité des sexes. Elle a mis en relief la contribution de la Slovénie aux efforts visant à assurer la sécurité internationale.

Pour la représentante, les efforts visant à renforcer l’état de droit au niveau national devraient aller de pair avec l’état de droit au niveau international. Saluant la contribution des tribunaux internationaux et hybrides au règlement pacifique des différends, elle a cité la décision de la Cour permanente d’arbitrage dans l’affaire portant sur les frontières terrestre et maritime de la Slovénie et la Croatie. « Le non-respect des décisions des tribunaux internationaux constitue un non-respect de l’état de droit », a-t-elle martelé. Enfin, elle a encouragé les États Membres à rejoindre la Cour pénale internationale (CPI), et salué l’inclusion cette année de la responsabilité de protéger au programme de l’Assemblée générale.

M. OMER DAHAB FADL MOHAMED (Soudan) a déclaré que les efforts en vue du renforcement de l’état de droit accompagnent le renforcement des capacités des institutions soudanaises, conformément à la constitution nationale. Il a estimé que nous avons besoin de la participation de l’ONU aux efforts collectifs, notant toutefois que le rapport du Secrétaire général s’intéresse davantage aux questions nationales qu’internationales. S’agissant de la peine capitale, le Soudan considère que cette question relève du droit national et de la culture de son pays, estimant que la Sixième Commission n’est pas le lieu pour examiner ces questions.

La résolution pacifique des différends constitue le meilleur moyen d’éviter les conflits, a poursuivi le représentant, indiquant que les États se doivent d’agir de façon transparente, conformément au droit international. Il faut un juste équilibre entre les dispositions de l’état de droit aux niveaux national et international. Pour lui, le principe d’égalité et de souveraineté des États doit permettre à chaque pays de participer à la mise en place de sa législation au niveau international, tout en évitant la mise en œuvre sélective du droit international. Il a mis en garde contre « les risques inhérents aux tentatives d’imposition de modèles spécifiques de gouvernance ou du droit ».

M. Mohamed a appelé le Conseil de sécurité et les institutions de l’ONU à demander des avis consultatifs à la Cour internationale de Justice (CIJ), tout en évitant la politisation des institutions juridiques internationales. Selon lui, la Cour pénale internationale (CPI) est « un mécanisme de politisation de la justice au niveau des individus » en vertu d’une politique de deux poids, deux mesures, ce qui sape les objectifs de l’état de droit.

M. AMMAR AL ARSAN (République arabe syrienne) a indiqué que l’état de droit est un objectif « suprême et absolu » pour tous les États et qu’il doit être défendu dans les faits, non par des paroles. Nous ne pouvons pas accepter de renier nos responsabilités, qui consistent à défendre les principes de la Charte, a-t-il dit. Se voulant « très sincère », le délégué a déclaré que le défi principal à la mise en œuvre de l’état de droit est bien l’approche deux poids, deux mesures et les efforts de polarisation politique et financière de certains pays, qu’il a appelés « les pays donateurs ». Il a en outre mis en garde contre la politisation de principes humanitaires en vue de justifier des menées interventionnistes.

Le délégué a déploré que le rapport passe sous silence les efforts de son gouvernement dans ce domaine. Le Mécanisme international, impartial et indépendant chargé de faciliter les enquêtes sur les violations les plus graves du droit international commises en République arabe syrienne a été créé à la suite d’un empiètement de l’Assemblée générale sur les prérogatives du Conseil de sécurité, a-t-il dit. Le délégué a ajouté que la résolution de l’Assemblée créant ledit Mécanisme n’a pas fait l’objet d’un consensus et que son pays n’a jamais reconnu et ne reconnaîtra jamais ce Mécanisme car il est « illégal ». Cette position est partagée par un nombre grandissant de pays, ce Mécanisme étant un « scandale juridique et moral », a-t-il asséné.

D’après M. YOUNG-HYO PARK (République de Corée), l’état de droit ne doit pas servir de moyen pour exclure une région ou un pays en particulier mais bien pour nourrir le dialogue et la coopération. Le délégué a invité la Commission à circonscrire son programme de travail et à dûment prendre en compte les points de vue des États.

Rappelant la participation active de la République de Corée à l’élaboration du Statut de Rome, le représentant a mentionné la loi adoptée en 2007 sur les crimes soumis à la compétence de la Cour pénale internationale (CPI), reflétant le principe de complémentarité entériné par ledit Statut. Enfin, il a affirmé que le renforcement de l’état de droit aux niveaux national et international est crucial pour la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030.

M. RUBÉN RUBEN ARMANDO ESCALANTE HASBÚN (El Salvador) a souligné l’appui fourni par les Nations Unies afin de renforcer la démocratie et le développement ainsi que l’institutionnalisation des droits de l’homme. Alors qu’El Salvador célèbre le sixième anniversaire de la signature des accords de paix, il a reconnu l’importance de se pencher sur les divers éléments constitutifs du cadre institutionnel du pays, dans le strict respect des droits de l’homme.

Le représentant a décrit les mesures pris par son pays pour combattre la corruption des fonctionnaires, notamment le Tribunal d’éthique gouvernementale et la section de la probité de la Cour suprême, un outil efficace qui a permis la mise en accusation de hauts fonctionnaires du Gouvernement. De même la loi d’accès à l’information permet la pleine participation des citoyens à la vie publique. Enfin, il a considéré que le Plan El Salvador sécuritaire a permis l’adoption de politiques destinées à protéger les droits des femmes et des filles.

Intervenant devant la Sixième Commission, la Présidente de l’Assemblée générale, Mme María Fernanda Espinosa Garcés, a soutenu que l’état de droit est la base sur laquelle reposent les trois piliers des Nations Unies. Elle a insisté sur la nécessité d’éliminer le terrorisme international et de renforcer la Stratégie antiterroriste mondiale, déplorant par exemple l’enlèvement d’enfants et de femmes, notamment en Afrique de l’Ouest. Elle a également souligné l’importance de mettre la dernière main à l’élaboration d’une convention internationale sur le terrorisme.

La Présidente a invité les délégations à trouver des solutions innovantes pour que l’action des Nations Unies « bénéficie à la sagesse des peuples ». Elle a réitéré la politique de tolérance zéro en matière d’activités criminelles commises par le personnel des Nations Unies. Elle a félicité la Commission du droit international à l’occasion de son soixante-dixième anniversaire. « Rapprocher l’ONU des peuples nécessite que nous travaillions à la défense de leurs droits et intérêts », a-t-elle conclu.

M. ALEX GIACOMELLI DA SILVA (Brésil) a rappelé que son pays a attiré l’attention, à l’ouverture de la présente session de l’Assemblée générale, sur l’importance de nourrir, de développer et de protéger le droit international afin d’améliorer l’ordre international sur lequel est fondée l’ONU. La défense du droit international est la seule manière de procéder, a-t-il ajouté. L’état de droit signifie que tous les pays, même les plus puissants, sont tenus de se soumettre à leurs obligations juridiques, a observé le représentant, qui estime que « les prétentions à l’exceptionnalisme sont incompatibles avec un système basé sur des règles ». Il faut donc trouver des solutions pour renforcer le multilatéralisme malgré l’asymétrie existante au sein des Nations Unies.

L’accès à la justice joue un rôle central pour s’attaquer aux causes profondes de la pauvreté et de l’exclusion, notamment l’aide juridique, a poursuivi le représentant, pour qui, il est crucial que les migrants, demandeurs d’asile et apatrides bénéficient d’une identité juridique. Au Brésil, la loi sur les migrations adoptée en 2014 prévoit la défense des droits des apatrides. Il a déploré en terminant l’incapacité de la Sixième Commission de s’entendre sur un sous-thème sur l’état de droit, qui lui permettrait pourtant de mieux cibler son action.

M. ROBERT KAYINAMURA (Rwanda) a déclaré que son pays partage l’approche des Nations Unies, notamment en ce qui concerne le renforcement de l’appropriation nationale des initiatives de réforme, la fourniture d’une assistance technique alignée avec les évaluations et priorités nationales et la coordination avec les acteurs clefs, dont la société civile. Il partage aussi le point de vue selon lequel il faut favoriser l’état de droit par la codification, le développement et la promotion des cadres juridiques internationaux et par l’analyse du rôle et de la contribution des cours, tribunaux et mécanismes non judiciaires.

La Constitution du Rwanda est basée sur le principe d’égalité des droits, de traitement et de garanties de droits fondamentaux pour tous, a précisé le représentant. « L’expérience du Rwanda au sortir du génocide est un exemple fort, dans un pays où il y a des centaines de milliers de génocidaires et une forte tendance à une approche punitive. » Au lieu de cela, le pays a cherché un équilibre entre la stricte application de la loi punitive et des alternatives réparatrices dans le but de conserver l’exigence de justice et l’harmonie sociale, a-t-il souligné. Cette solution faite maison, à travers le système des cours traditionnelles de Gacaca a été plus efficace que n’importe quel système, s’est félicité le représentant.

D’après M. SIDNEY GREGORY KEMBLE (Pays-Bas), l’accès à la justice, la réforme de secteur juridique et la justice transitionnelle sont essentiels à la prévention des conflits et à la paix durable. Ce sont également des éléments critiques pour aborder les facteurs conduisant aux inégalités, à l’instabilité et aux conflits de manière à garantir une paix durable. Les Pays-Bas se sont engagés à accélérer l’égal accès à la justice pour tous. Ils président, avec l’Argentine, la Sierra Leone et le comité des sages, l’Équipe spéciale sur l’accès à la justice dans le cadre de l’initiative Pathfinder.

Alors que l’on commémore le vingtième anniversaire du Statut de Rome créant la Cour pénale internationale (CPI), M. Kemble a aussi déclaré que tous les États signataires doivent continuer d’y apporter leur soutien politique, financier et logistique. Il a noté que l’utilisation d’armes microbiennes, biologiques ou toxiques et autres armes indétectables aux rayons X, est désormais considérée comme relevant de crimes de guerre et tombant donc dans la juridiction de la Cour. À ce titre, les Pays-Bas attendent de pouvoir discuter avec le Mécanisme international indépendant et impartial sur la Syrie qui présentera bientôt son second rapport à l’Assemblée générale, a-t-il conclu.

M. RISHY BUKOREE (Maurice) a indiqué que l’état de droit est crucial pour réaliser le Programme 2030. Par ailleurs, les États devraient accepter la compétence de la Cour pénale internationale (CPI), a-t-il dit. « La primauté du droit permet de protéger les individus contre le népotisme et l’anarchie. » Dans le cas de Maurice, la primauté du droit est consacrée par la Constitution, laquelle prévoit notamment la protection du droit à la vie et de la liberté d’expression.

Le délégué a détaillé les mesures prises par son pays pour lutter contre la criminalité transnationale organisée et la piraterie. Enfin, il a souligné l’importance des traités pour la formation du droit international. « Espérons qu’à long terme tous les États se traitent d’égal à égal. »

Mme ANET PINO RIVERO (Cuba) a réitéré son engagement à renforcer un véritable état de droit à même de changer l’ordre international actuel « injuste ». Pour elle, un véritable état de droit commence par la réforme des Nations Unies et la participation de l’ensemble de la communauté internationale aux travaux de l’Assemblée générale afin d’assurer le développement progressif et la codification du droit international. L’état de droit implique la démocratisation des organisations économiques et monétaires internationales qui doivent être « au service du développement des peuples ». Alors que certains membres du Conseil de sécurité violent ouvertement le droit international afin d’imposer leur domination sur les pays en développement, Cuba s’est engagé à travailler à le rendre plus démocratique, transparent et inclusif. La représentante a réaffirmé que l’égalité souveraine des États, le respect du droit national, la non-sélectivité et la non-ingérence dans leurs affaires internes constituent le fondement de l’action des États et de l’état de droit.

Rejetant la politisation de la question de transversalité, elle a réaffirmé que les membres de la Sixième Commission ont le loisir de débattre de toute question jugée pertinente adoptée par consensus. Elle s’est félicitée des progrès réalisés, avec la contribution de son pays, en faveur de la paix en Colombie. La représentante a également rejeté les lois extraterritoriales découlant du blocus économique et commercial imposé contre Cuba par les États-Unis depuis plus de 50 ans, et rappelé les innombrables résolutions de l’Assemblée générale à cet effet. Enfin, elle a décrit la réforme constitutionnelle en cours afin de renforcer le système politique et juridique cubain.

M. VITAVAS SRIVIHOK (Thaïlande) a déclaré que pour parvenir à la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030, et en particulier de l’objectif 16 relatif à l’avènement de sociétés pacifiques et ouvertes à tous, il faut apporter l’état de droit « au plus près des populations », de manière inclusive. Les Règles des Nations Unies concernant le traitement des détenues et l’imposition de mesures non privatives de liberté aux délinquantes (Règles de Bangkok) sont un des nombreux exemples qui témoignent des efforts constants de la communauté internationale pour atteindre ceux qui sont souvent laissés pour compte, a-t-il affirmé.

Cela dit, l’élaboration de normes aux plans national et international, ne suffit pas à elle seule pour établir l’état de droit partout. Il faut que ces lois soient comprises et intégrées par les gouvernements, leurs fonctionnaires, les acteurs non étatiques et les individus eux-mêmes. Pour cette raison, la Thaïlande apprécie les efforts des Nations Unies pour faire connaître et disséminer le droit international. La Thaïlande a eu le plaisir de coorganiser avec la Division de la codification, un cours régional sur le droit international dans la région Asie-Pacifique. Elle espère poursuivre une telle coopération à l’avenir, a conclu son représentant.

M. GEORGES EL JALLAD (Liban) a rappelé que son pays suit le modèle dit « de la démocratie consensuelle » qui fait que le système politique libanais est l’un des plus représentatifs au monde. Il a invité l’ONU à intensifier son action aux fins de renforcement des capacités des États dans la promotion de l’état de droit.

Sur le plan international, le délégué a invité l’ONU à œuvrer au rétablissement de la confiance dans le multilatéralisme et à promouvoir « une culture du respect du droit international. » Il a en outre souligné l’utilité de la Cour internationale de Justice (CIJ) pour régler les questions juridiques en suspens. Enfin, le délégué libanais a proposé comme idée de sous-thème celui du « rôle de la médiation dans les conflits ».

M. VINCENT RITTENER (Suisse) a déclaré être satisfait du rapport du Secrétaire général, en particulier lorsqu’il met en lumière les efforts déployés par les Nations Unies pour améliorer la coordination, la cohérence et l’efficacité en matière d’état de droit. La Suisse prend note de l’appui apporté aux États pour améliorer les capacités nationales des juridictions nationales, notamment leurs capacités à poursuivre les auteurs de crimes internationaux, car, de son point de vue, des systèmes judiciaires efficaces, indépendants et impartiaux constituent un préalable fondamental à ce que les États exercent leur responsabilité première dans la poursuite des crimes internationaux.

Le délégué a également estimé que la lutte contre l’impunité est essentielle à la mise en œuvre de l’état de droit. Pour cette raison, il a appuyé la Cour pénale internationale (CPI) et pointé l’activation récente de sa compétence en matière de crime d’agression. La Suisse se réjouit aussi de l’adoption d’amendements à l’article 8 du Statut de Rome, la rendant désormais compétente pour les crimes commis avec l’utilisation d’armes spécifiques, en particulier biologiques ou indétectables aux rayons X.

Évoquant les progrès réalisés par son pays au cours des dernières années dans le domaine de l’état de droit, M. MADYEN ABDULRAZZAQ AL-KELASH (Iraq) s’est félicité de l’organisation de scrutins libres et réguliers organisés par la Commission électorale indépendante et de l’existence d’un système judiciaire indépendant. Il a décrit les dispositions juridiques adoptées pour combattre la traite des personnes et la torture aux niveaux national et international.

L’Iraq poursuit ses efforts pour réaliser le développement durable et ériger la société de demain, notamment par l’adoption de lois autorisant les syndicats et les bonnes pratiques en matière d’emploi, a indiqué le représentant. Il a parlé de la création de l’autorité nationale pour l’investissement afin de développer des pratiques d’investissement solides. De concert avec l’ONU, le Gouvernement s’efforce d’améliorer la transparence et l’obligation de rendre compte.

M. SHRI PREM DAS RAI (Inde) a déclaré que la légitimité du droit dérive de la représentativité et de l’acceptation des organes qui le façonnent. Bien appliquées, des lois basées sur les principes de justice et d’équité minimisent les conflits. Alors que le multilatéralisme est nécessaire pour gérer les défis qui se posent à un monde globalisé et interconnecté, il est aujourd’hui sous tension. À tel point que plusieurs domaines du droit international qui touchent aux intérêts de tous n’ont pas connu de progrès ces dernières années. Par exemple, « des intérêts géopolitiques étroits et des concepts juridiques derrière lesquels se cachent certains États » empêchent la communauté internationale d’avancer sur un projet de convention internationale globale contre le terrorisme, a déploré le représentant.

En ce qui la concerne, l’Inde, « la plus grande démocratie du monde », reste convaincue que le multilatéralisme est la seule réponse aux défis actuels, a poursuivi M. Rai. Son gouvernement s’est toujours activement engagé dans des processus internationaux visant à élaborer des normes et des lois à caractère global. En tant que partie à divers instruments et traités internationaux, l’Inde a par ailleurs pris toutes les mesures pour faire entrer ces traités en vigueur, en plus d’adhérer à de nouveaux instruments, comme la récente ratification de la Convention de Minamata sur le mercure. Elle considère aussi que le droit n’est pas statique et évolue selon les circonstances. Pour ces raisons, l’Inde est d’avis que le multilatéralisme et le droit international, pour être efficaces, exigent une gouvernance qui reflète les réalités contemporaines. En conclusion, il a plaidé pour une réforme des structures des Nations Unies, en particulier du Conseil de sécurité.

M. MODEST JONATHAN MERO (République-Unie de Tanzanie) a parlé des mesures prises par le Gouvernement afin de rendre ses différentes composantes plus accessibles et responsables. Parmi les réformes judiciaires en cours, il a cité l’accélération du traitement des affaires devant les tribunaux et la modernisation de la technologie. Le Gouvernement continue de recourir à des cours itinérantes dans les régions dépourvues d’institutions judiciaires afin d’améliorer l’accès à la justice et de réduire les coûts qui y sont associés, a indiqué le représentant.

En outre, a poursuivi M. Mero, une restructuration du Bureau du procureur est en cours afin d’en renforcer les capacités et de le décharger des affaires civiles. Il a noté la poursuite de la vaste campagne anticorruption instituée au cours des dernières années dans l’ensemble des ministères et départements du Gouvernement tanzanien, avec l’appui de la population.

M. THABO MOLEFE (Afrique du Sud) a noté les importants développements s’agissant de la Cour internationale de Justice (CIJ), en rappelant la décision du 22 juin 2017 de l’Assemblée générale de solliciter un avis consultatif de la Cour sur les conséquences juridiques de la séparation de l’archipel des Chagos de Maurice. Dans cette affaire, mon pays a soumis une déclaration écrite, dans laquelle il insiste notamment sur la compétence de l’Assemblée pour demander un avis consultatif à la Cour et sur la compétence de celle-ci pour donner un tel avis, a-t-il déclaré. Le délégué a indiqué que la primauté du droit est consacrée par la Constitution de l’Afrique du Sud. Les tribunaux sont indépendants et doivent appliquer le droit de manière impartiale, a conclu M. Molefe.

M. FINTAKPA LAMEGA DEKALEGA (Togo) a déclaré que son pays poursuit son processus de réformes constitutionnelles et institutionnelles en vue de consolider les acquis démocratiques et de garantir les droits et libertés pour tous. Il a insisté sur les efforts de son Gouvernement pour trouver une issue définitive aux « malentendus politiques » au Togo en continuant de rassembler la classe politique et la société civile autour des objectifs de paix et de progrès social et humain. Il a précisé que les réformes préconisées par la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) pour le Togo doivent prendre en compte notamment la limitation à deux du nombre de mandats présidentiels.

Enfin, le délégué a souhaité que la Commission trouve cette fois-ci un sous-thème « pour orienter nos délibérations l’année prochaine afin que le précédent observé lors de la Soixante douzième session où nos divergences ne nous ont pas permis d’en dégager ne soit qu’un mauvais souvenir. »

Selon M. JUAN SANDOVAL MENDIOLEA (Mexique), le renforcement de l’état de droit aux niveaux national et international est vital pour garantir la mise en œuvre des principes de l’ONU ainsi que la réalisation du Programme 2030 et des objectifs de développement durable. Il a salué l’aide fournie par les Nations Unies pour renforcer les capacités nationales en matière de justice et de sécurité, notamment en matière d’enquêtes et de poursuites pénales. Le représentant a également salué la contribution de l’Organisation des États américains (OEA) à la lutte contre la violence envers les femmes et contre la corruption.

Le représentant a invité la communauté internationale à accentuer ses efforts de codification et de développement progressif du droit afin de faire face aux défis changeants de la réalité mondiale. Pour ce faire, il a exprimé son appui à la création d’un instrument international juridiquement contraignant sur la conservation de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale. Par ailleurs, M. Sandoval Mendiolea a considéré que le Conseil de sécurité doit procéder à la réévaluation du traitement des communications reçues en vertu de l’Article 51 de la Charte des Nations Unies sur l’exercice du droit de légitime défense afin d’éviter d’augmenter de façon irrégulière les exceptions à la prohibition générale de l’usage de la force par les États. Enfin, il a invité les États Membres à respecter les droits des migrants en attendant l’adoption prochaine du Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières.

« Assailli de toutes parts », l’état de droit doit demeurer une priorité, notamment pour garantir l’application le principe de responsabilité, a recommandé Mme MARIA ALEJANDRINA SANDE (Uruguay). Elle a plaidé pour un appui accru aux tribunaux internationaux afin de combattre l’impunité et d’assurer une paix pérenne. Soulignant l’objectif 16 de développement durable, qui appelle au renforcement de l’état de droit au niveau national, elle a estimé que la cohabitation pacifique des États n’est possible que par l’application de normes conventionnelles et coutumières et du respect de la souveraineté des États.

Ainsi, chaque État doit incorporer dans sa législation nationale des normes qui traduisent ses engagements internationaux, comme l’a fait l’Uruguay avec les crimes relevant de la compétence de la Cour pénale internationale (CPI). La représentante a également appelé les États Membres à reconnaître la compétence obligatoire de la Cour internationale de Justice (CIJ). La lutte contre le terrorisme doit être un objectif de l’ensemble de la communauté internationale, a-t-elle ajouté, afin de garantir la primauté de l’état de droit aux niveaux national et international. À cet égard, il faut renforcer la diffusion de l’état de droit et renforcer la codification du droit international, a-t-elle considéré.

M. IGOR BONDIUCK (Ukraine) a déclaré que l’état de droit est le principal outil pour défendre l’intégrité territoriale, la souveraineté des États et promouvoir les droits de l’homme. À titre national, a-t-il souligné, l’Ukraine est engagée en faveur de la résolution pacifique des conflits, y compris pour régler la question de « l’agression militaire russe ». C’est pour cette raison que l’Ukraine a engagé des poursuites devant diverses juridictions internationales contre la Fédération de Russie avec d’importants succès. Mais en dépit de la décision de nature contraignante rendue au début de 2017 par la Cour internationale de Justice (CIJ) demandant à la Fédération de Russie de « s’abstenir de maintenir ou d’imposer des limitations sur la capacité de la communauté tatare de Crimée de conserver leurs institutions, y compris le Mejlis », ce pays continue d’ignorer cet ordre, a déploré le représentant, appelant la Fédération de Russie à remplir ses obligations internationales.

Le délégué a également déclaré que, peu importe le nombre de parties à un traité, celui-ci doit être respecté. Or la Fédération de Russie ne respecte pas le traité d’amitié, de coopération et de partenariat qui le lie à l’Ukraine. Elle en ignore les principaux principes, y compris ceux interdisant le recours à la menace ou la violation de l’intégrité territoriale, comme le montre l’agression dont est victime l’Ukraine de la part de la Fédération de Russie, a-t-il dénoncé.

Mme AHUVA SEIFRERAS (Israël) a souligné l’engagement de son pays en faveur de la défense des droits de l’homme, notamment ceux de la communauté LGBT, des femmes, des personnes handicapées et des minorités. Cet engagement est mis au défi par les graves menaces, en particulier terroristes, qui pèsent sur le peuple israélien, a-t-elle dit. « Ces menaces constituent un dilemme pour toute démocratie et Israël n’est pas seule à devoir trouver un équilibre entre sécurité et impératif militaire et protection des droits humains. »

Sur le plan international, la déléguée a discuté de la contribution des tribunaux internationaux à l’état de droit, en indiquant que la caractéristique de tout organe judiciaire est une application juste des principes juridiques. « Il est dans l’intérêt de tous ceux qui souhaitent des institutions judiciaires robustes et crédibles au niveau international que les tribunaux internationaux n’outrepassent pas leurs compétences », a conclu Mme Seifreras.

« Nous le voyons aujourd’hui, l’état de droit n’est pas emporté par un seul grand tsunami, il est plutôt érodé par de petites ondulations et vagues d’injustice, de négligences et d’ignorance », a déclaré Mme SONALI SAMARASINGHE (Sri Lanka). Rappelant les souffrances endurées dans son pays en raison de 30 années de terrorisme et de la culture d’impunité qui les a accompagnées, elle a indiqué que le peuple de son pays veut éviter de répéter les erreurs du passé. À cette fin, a pris plusieurs mesures pour reconstruire ses institutions démocratiques et créer un cadre pour la réconciliation entre ses communautés.

Au niveau international, la déléguée a déclaré que l’état de droit doit protéger tous les États, en particulier en développement, de « la dureté d’un monde empiriquement inégalitaire. » Enfin, elle a insisté sur l’importance des traités multilatéraux dans la promotion de l’état de droit.

M. THOMAS B. AMOLO (Kenya) a souligné l’importance d’une bonne diffusion du droit international pour la promotion de la coopération multilatérale et le renforcement de l’état de droit au niveau international. À ce titre, il a prôné l’utilisation des moyens électroniques pour une telle diffusion, avant de demander le renforcement des capacités des pays pour la promotion de l’état de droit.

Le délégué a ainsi encouragé l’ONU à coopérer avec les pays en développement, en prenant en compte les caractéristiques socio-économiques et juridiques de ces derniers. « Partisan résolu d’une approche équilibrée s’agissant de l’état de droit aux niveaux national et international, le Kenya est pleinement engagé en faveur d’une exécution efficace de ses obligations internationales », a-t-il conclu.

M. SOLOMON KORBIEH (Ghana) a passé en revue les mesures prises par son pays pour renforcer l’état de droit, parmi lesquelles la ratification des instruments internationaux pertinents et l’établissement de mécanismes de supervision des pratiques policières. La législation du Ghana prévoit également qu’un avocat soit commis d’office et la fourniture d’une aide juridictionnelle afin que tous les Ghanéens, en particulier les plus pauvres, aient droit à un procès équitable.

Le délégué a mentionné en outre le programme « Justice pour tous » qui fournit un appui aux personnes en détention provisoire dont le procès fait l’objet de retards déraisonnables. Enfin, il a redit l’engagement indéfectible de son pays pour l’état de droit, fondement de la Constitution de 1992.

M. MARTÍN GARCÍA MORITÁN (Argentine) a estimé que la lutte contre l’impunité en cas de violations graves des droits de l’homme est essentielle pour le renforcement de l’état de droit. Il a exprimé son appui aux efforts de l’ONU pour développer les capacités des États Membres dans le domaine de la reddition de compte au niveau national pour les crimes graves définis en droit international. Il a appelé à cet effet au renforcement de la coopération Sud-Sud et à l’échange d’informations et d’expériences.

Au niveau international, le Statut de Rome établissant la Cour pénale internationale (CPI) représente l’un des succès les plus significatifs de la communauté internationale pour combattre l’impunité et un élément central de l’état de droit qui devrait acquérir un caractère universel. M. García Moritán s’est félicité de la mise en œuvre de la compétence de la Cour pour le crime d’agression, réaffirmant la primauté du droit et de la justice sur la force dans les relations internationales. Il a également salué l’apport du Mécanisme résiduel pour les tribunaux internationaux et du Mécanisme international, impartial et indépendant pour la Syrie, ainsi que celui de la Cour internationale de Justice (CIJ), principal organe judiciaire des Nations Unies. Enfin, le représentant a souligné l’importance pour les États Membres de négocier de bonne foi afin de parvenir à une solution pacifique de leurs différends. En outre, il a considéré que les organisations régionales d’Amérique latine jouent un rôle important dans le renforcement des institutions démocratiques.